4. TECHNIQUES OPERATOIRES DE PREVENTION
Si la prévention à l’égard des lésions carieuses ou
des surfaces lisses passe par la fluoroprophylaxie, celle à
l’égard des puits et fissures passe soit par leur
scellement (fissure sealants ou restauration préventive)
soit par la réalisation d’une odontotomie
prophylactique.
L’obturation des fissures est le moyen de prévention
le plus efficace. Elle est sous la responsabilité du
praticien qui choisit la méthode en fonction de critères
cliniques précis et ceci, dans le plus court délai suivant
l’éruption des dents concernées.
Les anfractuosités des faces occlusales sont autant de
possibilités de rétention de la plaque bactérienne. Comme
elles sont plus larges que les bactéries,
l’autonettoyage ou les techniques de brossage sont
inefficaces, ce que nombreux auteurs avaient déjà remarqué.
Pour BODEKER, 90% des fissures se carient. Pour BRUCKER,
98% des surfaces occlusales des premières molaires
deviennent cariées. Pour HYATT :
le
début des caries est invisible à l’œil nu,
la sonde la plus fine ne peut déceler le début d’une
carie,
il y a 2500 chances contre 1 que les fissures se carient.
La dent de six ans est souvent négligée car elle fait son
éruption dans un contexte défavorable :
Période d’hygiène
aléatoire ou en cours d’apprentissage,
Position très postérieure sur l’arcade (difficulté
d’accès),
Diététique souvent inadaptée, renforcée par une plus grande
autonomie de l’enfant,
Immaturité de l’émail,
Particularités anatomiques : fissures occlusales,
fossettes palatines des premières molaires supérieures,
fossettes vestibulaires des premières molaires inférieures.
Pour toutes ces raisons, la première molaire collectionne à
elle seule 55% des lésions carieuses. Pour les prévenir il
existe deux types de techniques extrêmement
efficaces, très valorisantes pour le praticien
(satisfaction de soi et de son éthique) et encourageantes
pour son jeune patient (traitement peu ou pas invasif et
indolore):
La
substitution : on remplace l’émail par
un matériau inerte : c’est l’odontotomie
prophylactique proposée par HYATT en 1923.
L’interposition :
on interpose le matériau entre la surface dentaire et un
environnement hostile. C’est le principe des
scellements des sillons (fissure sealants) et des
restaurations préventives. L’avènement de la
dentisterie adhésive au début des années 70 a permis le
concept de protections des surfaces occlusales par collage
d’un matériau.
4.1.
ODONTOTOMIE PROPHYLACTIQUE (cf schéma
p.123)
4.1.1.
Indications
sur
dent saine présentant des sillons anfractueux
sur dent avec présomption de carie
en cas d’impossibilité de collage
4.1.2.
Principe
Ne jamais faire participer la dentine : pour ce faire,
il faut de la dextérité et une parfaite connaissance de
l’anatomie dentaire. Il est nécessaire
d’utiliser des fraises adaptées H23 ø009, H21 ø009,
H7ø009 de Komet.
La profondeur est constante et les dimensions de la cavité
idéale se situent entre 1 et 1,5 mm en profondeur et 1mm de
largeur. La suppression de toutes les anfractuosités
existantes est indispensable ; c’est la dent qui
dicte le tracé de la cavité. L’obturation est
immédiate soit à l’amalgame, soit aux composites
hybrides. Comme toujours, la correction de
l’occlusion et le polissage s’imposent.
4.2.
RESTAURATION PREVENTIVE
4.2.1.
Indications
La restauration préventive associe une technique de
substitution et une technique d’interposition. Cette
méthode de prévention est adaptée au traitement des lésions
carieuses amélaires ou amélodentinaires ponctuelles et
précoces de la surface occlusale tout en protégeant les
zones intactes. Lorsque les conditions cliniques
l’autorisent, c’est la méthode de choix.
4.2.2.
Principe
L’émail infiltré est
éliminé à l’aide d’une fraise boule diamantée
801 ø 009 ou 010 ou d’une fraise 8392 (Komet) ou avec
les fraises du coffret de microdentisterie (4997F de Komet)
sur CA bague rouge.
Si la dentine est concernée, elle est curetée avec une
fraise boule sur contre-angle puis désinfectée (ex
Dakin®)..
La forme clinique est guidée par l’éviction carieuse.
La cavité d’obturation ne nécessite pas de taille
particulière, la rétention du matériau étant assurée par le
mordançage.
La dentine exposée peut être protégée selon une épaisseur
la plus fine possible, soit avec de l’hydroxyde de
calcium, soit avec un compomère ou un verre ionomère, soit
avec de l’adhésif du système de collage.
L’ensemble de la surface occlusale (cavité(s) et
fissures) est obturé avec un composite hybride qui est
foulé et bruni, de façon à obtenir une intimité de contact
dent/matériau.
La correction de l’occlusion et le polissage
s’imposent.
4.3. SCELLEMENT DES SILLONS
4.3.1.
Indications
83 à 89% des caries des dents définitives de l’enfant
âgé de 5 à 17 ans se produisent sur les puits et fissures.
Leur scellement permet de transformer des zones
anfractueuses en zones accessibles au brossage.
Son utilité est incontestable : la rétention
d’un agent de scellement est de 98% à un an et son
efficacité (c’est-à-dire l’absence de
développement de carie) est de 88%.
Le scellement des fissures doit être impérativement
effectué :
sur
une dent exempte de lésion carieuse.
en l’absence de contamination salivaire.
Le moment d’intervention préconisé par de nombreux
auteurs doit se situer le plus près possible de
l’éruption. Cependant, deux critiques peuvent être
proférées sur ce choix :
l’émail est encore
immature et le scellement le prive de l’apport
minéral salivaire.
l’évolution clinique incomplète empêche parfois la
pose de la digue et donc des conditions d’isolation
adéquates.
Le contexte donne la réponse, c’est-à-dire le risque
carieux selon le degré d’hygiène bucco-dentaire.
4.3.2.
Principe
Isolation : la qualité de
l’intervention diminue proportionnellement avec
l’augmentation de l’humidité régnant autour de
la dent concernée ! Si la salive prend la place de
l’adhésif dans les vacuités (15µ) créées par le
mordançage au sein de l’émail, l’adhérence du
sealer est compromise. Pour maintenir une bonne isolation,
le système idéal reste la digue. A défaut, il conviendra
d’utiliser des cotons salivaires, des canules adaptée
(type Hygoformic, si le plus grand contour coronaire
n’est pas apparu.)… et de travailler à 4
mains !
Nettoyage de la dent avec une brossette sans pâte,
Assèchement du champ opératoire avec un embout adapté à la
surface occlusale de la dent.
Pose de l’acide orthophosphorique à 37%. Il est
préférable de ne pas déborder dans les zones non concernées
par le scellement. Le temps de mordançage est lié au degré
de minéralisation de la surface amélaire. La
déminéralisation est effectuée lorsque les bulles
d’O2 apparaissent au sein du gel.
Rinçage long pour éliminer l’acide et ainsi stopper
son activité.
Séchage.
Plusieurs produits peuvent servir de sealants ; le
choix se fera en fonction des conditions cliniques :
les résines très faiblement chargées (type
Helioseal® de Vivadent) peuvent être
appliquées directement avec une sonde à bout mousse. Les
composites hybrides nécessitent l’application
d’une fine couche d’adhésif . Répartir le
composite sur la surface à sceller avec un brunissoir pour
obtenir une liaison intime dent/matériau.
Photopolymérisation (suivant instructions du fabriquant).
Retirer cadre et crampon.
Vérifier l’occlusion.
Polissage : fraises surlamées (12 à 30 lames) et
disque d’abrasivité décroissante (Pop-On, Shofu).
Différents
protocoles opératoires sont à la disposition des praticiens
pour protéger les surfaces occlusales des premières
molaires définitives. La mise en œuvre de telles
techniques de façon courante prévient l’apparition
des caries des fissures et on ne peut qu’encourager
la banalisation de leur utilisation.